A partir de Thoreau, la vie sublime (A. Dan et Leroy, éd. Le Lombard), réflexion autour de la question de la révolte avec une classe de troisième du Collège Manon Cormier de Bassens (33).
La désobéissance civile
Première planche : Thoreau et un groupe d’abolitionnistes œuvrent à la libération d’esclaves. Rappel du contexte historique, l’esclavage, le commerce triangulaire, la société américaine divisée en classes antagonistes. Que faire quand la loi est du côté de la force ? Peut-il y avoir des lois injustes ? Pourquoi désobéir ? Que veut dire obéir ? Obéir à ses parents et obéir à des maîtres esclavagistes, est-ce la même chose ?
Il faut distinguer l’obéissance par contrainte et l’obéissance née d’une autorité naturelle : je suis l’autre parce que je reconnais qu’il me guide légitimement.
Quand ce que la loi m’ordonne me semble inacceptable, intolérable, que faire ? Désobéir prend la forme de la révolte, d’une injonction à ne pas accepter. Pourquoi ? Pour sauver ma vie, pour défendre des idéaux qui me sont chers : la liberté, l’égalité, la dignité humaine, les droits de l’homme… citent pêle-mêle les élèves.
La résistance par la violence
Deuxième planche : John Brown, le Spartacus blanc passe à l’action directe et au crime contre des pro-esclavages. Qu’est-ce qui caractérise son action et la différencie de celle de Thoreau ? Violence et non-violence sont-elles du même ordre ? Le risque encouru n’est pas le même, la répercussion des actes non plus : libération d’esclaves dans un cas, terreur dans l’autre. La peur qui se répand chez les esclavagistes porte ses fruits puisque même Victor Hugo de sa retraite à Guernesey, lancera ses paroles le jour de la pendaison de John Brown :
« Oui que l’Amérique le sache et y songe, il y a quelque chose de plus effrayant que Caïn tuant Abel, c’est Washington tuant Spartacus. »
Mais n’y a t-il pas contradiction à tuer pour préserver la vie ? La parole peut-elle faire figure de révolte ? Quels exemples de révoltes non violentes portées par la parole ? Les discours de Martin Luther King contre la ségrégation, de JFK à Berlin, du Général de Gaulle le 18 juin 1940 : des mots qui rassemblent pour la libération des peuples.
Quelles questions philosophiques soulève cette histoire ?
- Pourquoi prendre des risques ?
- Pourquoi se rebeller ?
- Pourquoi se révolter ?
« Parce que personne ne le fera à notre place » : se révolter c’est faire émerger un « je » d’une masse d’individus informe. Et du je, se faire entendre et passer au nous. Ce « nous » qui n’est pas un « on » et qui permet d’ancrer l’action au cœur de personnes libres et responsables.
Et vous, qu’est-ce qui vous révolte ?
Contre l’indifférence, la plainte ou même le conformisme, chacun est appelé à entrer en résistance contre ce qui l’indigne, le révolte : « l’irrespect face aux professeurs », « le traitement infligé aux animaux », « l’injustice face à l’emploi », « le sort des sans-abri », « le réchauffement climatique », répondent les élèves. De belles raisons d’espérer que les jeunes prennent à bras le corps ces causes et les défendent, bien loin de la résignation.